Dans les coulisses de Weta Digital, troisième partie - Rencontre exclusive avec Jon Landau et révélations sur Avatar 2 & 3
Article Cinéma du Samedi 08 Octobre 2022

A l'occasion de la ressortie d'Avatar au cinéma, et en attendant l'arrivée d'Avatar: La Voie de l'eau en décembre, nous vous proposons de redécouvrir ce dossier exclusif!

Retrouvez la précédente partie de ce dossier


Nous nous sommes rendus récemment de l’autre côté de la planète, à Wellington, en Nouvelle-Zélande, pour rencontrer l’équipe de Weta Digital qui venait d’achever les nouvelles séquences de la version longue d’Avatar sous la direction de James Cameron, du producteur Jon Landau et du superviseur des effets visuels Joe Letteri.

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Entretien avec John Landau

Le procédé de capture de mouvements et d’expressions faciales change le travail du réalisateur et de l’acteur, mais est-ce aussi le cas du travail de producteur ?


Forcément, parce que le travail du producteur touche à tous les domaines de la création du film. Disons simplement que le producteur dispose à présent d’une autre boîte à outils ! A l’époque où je travaillais chez Disney, quand nous produisions Chérie, j’ai rétréci les gosses, nous utilisions de l’animation image par image pour faire bouger les insectes, et aussi de l’animation en direct, avec des marionnettistes qui bougeaient les pattes de la fourmi construite grandeur nature sur le plateau avec les acteurs. En 1989, même si nous utilisions des techniques bien différentes , mon rôle était identique.

Est-ce que la possibilité de créer tout un monde comme celui de Pandora donne parfois le sentiment d’être un dieu ?

La différence, c’est que dieu a travaillé seul ! (rires) Ici, tout le monde contribuait à la création de cette planète. Aujourd’hui comme par le passé, ce qui m’intéresse le plus en tant que producteur, c’est l’opportunité de créer des univers comme ceux de Chérie, j’ai rétréci les gosses, Dick Tracy, Titanic, ou Avatar. Il n’y a rien de plus satisfaisant que de contribuer à la création de ces mondes, et d’avoir le plaisir de proposer à quelqu’un de venir jeter un coup d’œil sur le plateau de tournage, pour voir son émerveillement.

Pourquoi ne communiquez-vous pas sur le budget d’Avatar  ou le coût de cette édition longue du film ?

C’est une décision que nous avons prise depuis le début, et nous nous y tenons. Vous savez, le cinéma est le seul business au monde où l’on ne vous fait pas payer plus cher votre place, même quand un film a demandé 20 fois plus d’efforts, de temps et d’argent qu’un autre. Nous pensons que l’essentiel n’est pas le budget mais le résultat.

Avez-vous été en mesure de produire les nouvelles scènes de cette édition plus rapidement, en raison de l’expérience acquise auparavant ?

Absolument ! C’est une de nos grandes satisfactions à propos de cette version longue d’Avatar. Quand nous avons indiqué à Weta la liste des plans que nous voulions finaliser, ils ont été capables de les réaliser dans des délais nettement plus courts. Et cela, nous le devons à la manière dont Joe Letteri a conçu l’organisation du travail au sein de Weta dès le début de la production d’Avatar. Il nous a dit « Laissez-nous le temps de construire d’abord les fondations de ce que nous avons à faire, et ensuite, une fois que tout sera en état de marche, nous pourrons ouvrir les vannes et avancer beaucoup plus vite. » C’était une démarche extrêmement intelligente de leur part. D’autres sociétés d’effets visuels se seraient précipitées en pensant au nombre de plans qu’il fallait livrer, au risque de tâtonner pendant la création trop rapide de ces effets. Weta nous a dit : « Vous ne verrez peut-être pas un seul plan finalisé pendant la première année, ou pendant deux ans, mais une fois que nous aurons construit toutes les structures de notre fonctionnement, nous serons peut-être capables de vous livrer 1000 plans pendant les trois dernières semaines de notre travail. »

Comment James Cameron a t’il approché cette édition spéciale ? A t’il considéré qu’il ne pouvait pas ajouter plus de 16 minutes à la version cinéma sans compromettre l’équilibre du film original ? Est-ce que certaines scènes qui étaient initialement sélectionnées pour être incluses dans cette version ont été finalement abandonnées ?

Non, ce n’est pas comme cela que nous avons fonctionné.  Nous avons fait le montage de cette version longue avec les versions inachevées de certaines scènes, et à cette étape, nous avons inclus toutes les séquences qui nous semblaient bien fonctionner, et que nous aurions été fiers de faire figurer dans la version présentée en salles, si nous en avions eu le temps et les moyens.

Quand le travail sur cette version longue a t’il débuté, et combien de temps de travail y avez-vous consacré, James Cameron et vous ?

Le travail a commencé en avril 2010 et il s’est achevé fin septembre par l’étalonnage des nouvelles scènes que Weta venait d’achever. Il fallait bien sûr que l’étalonnage des nouvelles séquences soit absolument identique à celui des autres. Ce sont les mêmes personnes qui avaient travaillé sur la première version du master vidéo qui ont travaillé sur celui-ci, et elles ont veillé de la même manière à la qualité de la compression des images pour obtenir la plus haute qualité possible. C’est un travail très délicat, qui se gère scène par scène. Il est possible de faire des concessions de compression dans une scène parce que ce sera invisible, et ensuite, nous récupérons cet espace libéré pour l’attribuer à une autre scène qui nécessite un nombre de données bien supérieur pour obtenir un rendu impeccable.

Quel est le statut de la future édition Blu-Ray en relief de cette version longue ? Et dans ce cas, est-ce que le relief de cette version Blu-Ray sera différent de celui de la projection en salles, pour tenir compte de la différence de taille de l’écran ? C’est peut-être une question naïve…

Non, pas du tout. Beaucoup de gens pensent qu’il faut adapter le relief à la taille des écrans de télévision, mais nous ne sommes pas d’accord avec ce point de vue. Nous estimons que l’espace 3-D Relief reste le même quoi qu’il arrive, et dépend de votre proximité par rapport à l’écran. L’écran étant plus petit, vous n’allez certainement pas vous asseoir à 9 mètres de distance de votre télé, chez vous. Le spectateur a tendance à se positionner à une distance qui correspond plus ou moins à la vision que l’on peut avoir d’un écran dans une salle, ce qui signifie que l’espace relief conçu pour le film est toujours valide quand vous le voyez en Blu-Ray chez vous. Nous avons travaillé avec des spécialistes de la 3-D Relief pour le Blu-Ray, afin de nous assurer que la version relief d’Avatar  serait de la meilleure qualité possible.

James Cameron a annoncé que ses deux prochains films seraient Avatar 2 & 3. A quel point du développement de ces deux épisodes en êtes-vous arrivé ? Disposez-vous déjà de traitements complets, ou simplement de résumés basiques des deux histoires ?

Je dirais que nous savons déjà quelle est la direction basique que Jim veut prendre dans les deux prochains épisodes. Nous n’en sommes pas encore au point où il ne reste plus qu’a écrire les scripts. Nous sommes toujours en train de discuter de certaines idées, et de rencontrer des gens. Nous en parlons avec des membres de l’équipe.

Mais diriez-vous que vous disposez déjà de deux traitements ?

Nous ne travaillons plus vraiment sous la forme de traitement à présent. Pour être plus précis, je crois que l’on peut dire que Jim a déjà établi deux concepts de films.

Que peut-on s’attendre à voir dans ces nouveaux volets de la trilogie Avatar? Va t’on explorer les lunes de Pandora, comme vous avez pu le laisser entendre par le passé ? Va t’on découvrir un univers sous-marin ?

Pour l’instant, tout est ouvert, rien n’est gravé dans le marbre. Mais je peux vous confirmer que nous allons bel et bien découvrir l’univers sous-marin de Pandora. Cependant, je ne voudrais pas que vos lecteurs croient que l’un des deux films va se passer entièrement sous l’eau, car ce ne sera pas le cas. Ce sera une séquence, exactement comme celle qui se déroule sur les montagnes flottantes, dans le premier film. Et personnellement, mais cela n’engage que moi, j’ai tendance à penser qu’il nous reste tellement de territoires à explorer sur Pandora que nous n’avons pas l’obligation de situer l’action ailleurs, sur les lunes qui gravitent autour d’elle. Nous aurons la possibilité de découvrir d’autres tribus, d’autres paysages. Je peux vous dire qu’il y aura beaucoup de nouvelles créatures. Certaines d’entre elles faisaient partie du « scriptment » original que Jim avait écrit, mais nous n’avions pas pu les inclure dans le récit définitif. Certaines d’entre elles étaient même arrivées jusqu’à l’étape du design, et nous avaient énormément plu. Mais nous les verrons vivre dans les prochains films !

Peut-on s’attendre à ce que les Na’vi s’adaptent à la technologie terrienne, pour mieux combattre les marcenaires humains qui ne vont pas accepter facilement d’avoir été chassés de Pandora, et privés de la source du précieux minerai ?

 (Jon Landau sourit en entendant la question) Mmmm…Le temps seul nous le dira ! (rires)

La suite de notre entretien avec Jon Landau sera publiée très prochainement sur ESI.

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