VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE 2 : L’ILE MYSTERIEUSE : Entretien exclusif avec l’immense Michael Caine - Seconde partie
Article Cinéma du Mercredi 22 Fevrier 2012

Suite de notre visite du tournage et des confidences de Sir Michael Caine !

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Il y a tout un jeune public qui vous découvert ces dernières années…

Oui, grâce à mon interprétation d’Alfred dans les Batman de Christopher Nolan. Je m’en suis rendu compte l’autre jour, en me promenant du côté de Picadilly Circus, à Londres. Il y avait un groupe d’une douzaine de jeunes japonaises de 12 à 14 ans qui m’ont reconnu et m’ont appelé « ALfled !!! ALfled !!! » (rires) Je leur ai signé des autographes et elles semblaient ravies. C’est assez déconcertant, parce que je suis en semi-retraite. VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE 2  est le second film que j’ai tourné en quatre ans. A présent, je n’accepte plus que ce que j’appelle « des offres que je ne peux pas refuser ». Cela n’a rien à voir avec l’argent que l’on me propose. J’ai tourné HARRY BROWN pour un tout petit cachet, et INCEPTION parce que j’adore Christopher Nolan. Après ce film, je tournerai dans THE DARK KNIGHT RISES, et il y a deux autres scripts qui me tentent beaucoup, un thriller et une comédie romantique dont je ne vous parlerai pas par superstition. L’expérience m’a appris que dès que l’on révèle des projets dont on n’a pas encore signé les contrats, on apprend quelques jours plus tard qu’ils sont tombés à l’eau, faute de financement. Et après, il faut rappeler tout le monde pour rectifier ses propos…

Vous semblez avoir gardé un enthousiasme intact pour votre métier…

C’est dû en grande partie au fait que je tourne de moins en moins souvent ! (rires) J’ai la chance de mener une vie très agréable auprès de ma famille, d’être heureux dans ma vie privée, et d’avoir le luxe de pouvoir choisir de ne travailler que quand j’en ai vraiment envie. J’aurais vraiment mauvaise grâce à me plaindre de tourner à Honolulu dans ces superbes paysages, en compagnie d’acteurs très sympathiques.

Comment collaborez-vous avec Brad Peyton, le réalisateur ?

Je n’ai pas vu ses films précédents, mais je dois dire qu’il a préparé très méticuleusement ce tournage et sait nous expliquer exactement ce qu’il veut. Avant de tourner chaque scène, il nous montre des animatiques afin que nous comprenions bien ce que l’on verra dans la séquence finalisée, une fois que les effets visuels auront été ajoutés. Nous visionnons les rushes immédiatement, entre chaque prise, ce qui nous aide aussi à comprendre ce que l’on peut améliorer. Brad est à la fois précis, sympathique et très compétent.

Quelles sont les scènes que vous avez préférées depuis votre arrivée sur le tournage, il y a deux semaines ?

Aucune, parce que pour le moment, nous marchons dans la boue, courons, escaladons des rochers, et ne disons que quelques mots ! (rires) Je pense que je prendrai plus de plaisir à tourner les scènes de dialogue des séquences plus calmes qui sont prévues la semaine prochaine. Nous avons tourné cependant une scène assez drôle pendant laquelle mon personnage imite les cris nuptiaux de deux lézards géants afin de détourner leur attention et de sauver ainsi le groupe dans lequel se trouvent Sean, Hank, Kailani et Gabato, le guide. Je sauve la vie de tout le monde en incitant ces dinosaures à s’accoupler ! (rires) Dans la scène avec les bourdons géants, je m’éloigne un instant pendant que les autres sont poursuivis, j’escalade une fleur géante, et j’arrive à sauter sur le dos d’un bourdon et à le chevaucher. J’incite mes compagnons à faire de même, et c’est ainsi que tout le monde quitte les lieux. Je me suis retrouvé assis sur un gros sac bleu fixé à une grue et placé devant un fond bleu, pour tourner cette scène. Heureusement, on n’a pas fait monter la grue trop haut par rapport au sol, car il n’y a pas grand chose qui permet de s’accrocher à un bourdon. J’avais un peu de mal à garder mon équilibre…

Selon vous, quel est le secret pour devenir un grand acteur ?

Voilà une question bien difficile… J’imagine que la meilleure façon d’agir consiste à devenir la personne que vous jouez à un tel point que vous abandonnez tous les « trucs » de comédie que vous avez appris. A ce moment-là, l’acteur que vous êtes disparaît, et plus important encore, votre propre personnalité disparaît. Voilà ma façon d’aborder les choses. Si par exemple, vous me voyez dans HARRY BROWN, et que vous vous tournez vers la personne qui se trouve à côté de vous pour lui dire « Ah, voilà Michael Caine, quel merveilleux acteur ! », cela signifie que j’ai échoué. Si j’avais réussi , vous auriez dû dire « Je me demande ce qui va arriver à Harry Brown, après tout ce qu’il a subi. »

Aimez-vous revoir vos films ?

Non, je ne les regarde jamais ! Je n’aime pas me voir sur un écran, et de plus, à chaque fois que je vois un nouveau film, je me rends compte que j’ai encore vieilli. Le pire, c’est quant on vous inflige un hommage pendant lequel on montre un montage interminable de tous les films de votre carrière, et vous vous retrouvez là, à vous voir décrépir et tomber en morceaux au fil des ans ! C’est atroce ! (rires) Je préfère rester en compagnie des miens et profiter de mes petits-enfants. Je n’ai jamais eu de fils, et mon petit-fils est mon portrait craché, en bien plus beau que moi. Il est comme le fils que je n’ai jamais eu, et nous nous entendons merveilleusement bien. Nous avons aussi deux jumeaux non identiques, un garçon et une fille, et nous sommes très heureux.

Vous prenez de l’âge sans perdre votre légendaire sens de l’humour…

Oh, vous savez, quand on me demande comment je réagis en vieillissant, je réponds toujours que je préfère cela à l’alternative… (rires) A présent, j’ai un peu moins de responsabilités. Je n’ai plus à me soucier de mon apparence à l’écran, car ce n’est pas grave si je tombe en ruines : les gens y sont habitués à présent, et je n’y accorde pas d’importance. Avec l’âge, on passe de moins en moins de temps à se regarder dans un miroir, croyez-moi. Ce n’est pas pareil pour les actrices, car elles disposent de tout un arsenal pour cacher le passage du temps. En ce qui me concerne, cela fait déjà quelques années qu’il n’y a plus rien à faire ! (rires)

Justement, le temps qui passe vous a t’il permis de jouer avec plus d’aisance ?

Non, parce que j’essaie toujours d’approfondir mon travail et de choisir des rôles plus difficiles. Mon rôle dans VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE 2  n’est pas complexe, mais ceux des deux projets de films que j’évoquais précédemment le sont. J’aime aussi énormément le rôle d’Alfred, car il est bien plus subtil et profond qu’il n’y paraît. Disons que je me lance des défis pour rester en forme et ne pas me contenter d’une routine. Refaire toujours la même chose serait terrible.

Pouvez-vous nous citer deux films de votre carrière que vous considérez comme quasiment parfaits ?

L’EDUCATION DE RITA et UN AMERICAIN BIEN TRANQUILLE. Je considère que ce sont deux rôles dans lesquels je suis parvenu à disparaître complètement, et deux personnages – respectivement un grand professeur et un criminel de banlieue – qui sont totalement éloigné de ce que je suis.

Pensez-vous que l’on vous choisit aujourd’hui en pensant aux classiques dans lesquels vous avez joué comme l’excellent thriller LA LOI DU MILIEU ou ALFIE LE DRAGUEUR ?

Probablement, car ces films repassent tout le temps à la télévision, et les réalisateurs ont l’occasion de les découvrir. Cela me surprend toujours quant un garçon de 17 ans vient me dire qu’il a adoré LA LOI DU MILIEU, parce qu’il vient de le voir à la télé.

Aimez-vous alterner les drames, les comédies et les films d’action ?

Oh oui, j’essaie d’apparaître dans des projets très différents les uns des autres. Dans la plupart des cas, j’essaie de m’amuser autant en les tournant que vous quand vous les verrez. C’est en tous cas ce que j’essaie de faire. Pendant la durée de ce tournage, j’habite dans le centre d’Honolulu, qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Miami et à Los Angeles. La différence, c’est qu’après un trajet d’une heure en voiture, on se retrouve dans une nature luxuriante, magnifique, intacte. Et c’est un vrai bonheur. Par chance, on n’a pas détruit l’île en construisant partout.

Pouvez-vous nous parler des idées que vous avez soumises au réalisateur à propos de votre rôle ? Votre costume, par exemple, est bardé d’accessoires…

(Michael Caine sort des accessoires de sa ceinture et de ses poches) Oui, j’ai un petit compas, et une loupe pour regarder le compas, parce qu’il est sacrément petit…(rires) Et ceci, c’est une balle de fusil qui a été travaillée pour devenir la plume métallique d’un stylo à encre. En ce qui concerne mon personnage, mes idées viennent de Jules Verne lui-même. Je crois que ce personnage est cinglé ! Très déterminé à atteindre les buts qu’il s’est fixé, très courageux, mais un peu maboule aussi. C’est un type très attachant.

Vous avez un accent et une prononciation très caractéristiques, qui est souvent imitée. Selon vous, qui vous imite le mieux ?

Anthony Hopkins, sans aucun doute ! Anthony est l’un des meilleurs imitateurs au monde. C’est même à lui que l’on a fait appel pour imiter Laurence Olivier quand on a restauré des scènes jadis coupées de SPARTACUS, et dont on avait perdu les pistes sonores.

La suite de notre reportage paraîtra bientôt sur ESI !

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