Dans les coulisses de PROMETHEUS - Troisième partie
Article Cinéma du Dimanche 27 Mai 2012

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Par Clark Kent

SUR LE TOURNAGE

Ridley Scott a toujours accueilli avec un grand intérêt les « nouveaux tours et nouveaux jouets » du cinéma, y compris les images de synthèse, mais il est aussi connu pour croire à ce qu’il appelle « le vrai truc », c’est-à-dire les plateaux où tout se fait concrètement. Il est vrai qu’à notre époque où tant de films à grand spectacle reposent essentiellement sur les images de synthèse, PROMETHEUS fait figure de rareté : il montre un monde de science-fiction à grande échelle où la plupart des décors, des accessoires et des cascades sont vrais. Cela donne au film une réalité tactile impressionnante, à travers des décors plus époustouflants les uns que les autres. Comme le faisait remarquer un des membres de l’équipe de production : « Ridley a construit le plus grand terrain de jeux extraterrestre du monde. » Les acteurs et l’équipe technique étaient admiratifs devant ce qu’ont créé le chef décorateur Arthur Max et ses équipes d’artisans. Michael Ellenberg commente : « L’impact de ce que vous ressentez lorsque vous vous trouvez dans ces décors est indescriptible. C’était une source d’inspiration à tellement de niveaux ! Il se passe tant de choses diffuses, instinctives quand vous tournez dans des décors réels… Tout le monde se comporte d’une façon plus naturelle parce qu’on a l’impression d’être dans un morceau de réalité. Le moindre détail du design était basé sur des références appartenant au monde réel, sur des idées et des notions de notre monde. Certaines sont des notions élevées, mais elles existent, elles sont présentes dans notre monde. Et si vous voulez terrifier les spectateurs, faire en sorte que les gens s’impliquent viscéralement et émotionnellement, les décors réels sont la seule façon de faire. »

La production a tourné sur cinq plateaux aux studios de Pinewood, en Angleterre, et notamment sur le fameux « plateau 007 », l’un des plus grands d’Europe, d’une surface de près de 5500 m2. En prenant un minimum d’espace en studio, les cinéastes ont quand même dû mobiliser cinq plateaux pour plus de 16 décors, et augmenter la taille du plateau 007 d’un peu plus d’un tiers. Le tournage principal a commencé en août 2010, même si une partie du travail avait déjà débuté plus tôt. Arthur Max a conçu non seulement les vaisseaux spatiaux et les véhicules, mais aussi le paysage de la planète sur laquelle se rend l’expédition, et les structures et le vaisseau qu’ils y découvrent. Le chef décorateur explique : « Pour le Prometheus, je voulais quelque chose qui soit à la pointe du progrès, ultramoderne, un vaisseau spatial amiral équipé de toutes les technologies requises pour sonder les recoins les plus éloignés de la galaxie. Nous avons étudié les designs de la NASA et de l’Agence Spatiale Européenne, et avons joué avec ces idées dans le contexte de ce que pourrait être le voyage dans l’espace de la prochaine génération. » Arthur Max a ensuite travaillé sur l’architecture intérieure du vaisseau et sur la manière dont elle répondrait à la forme extérieure.

La passerelle du Prometheus est un décor sur deux niveaux caractérisé par une attention extraordinaire aux détails et une technologie stupéfiante, dont un gigantesque pare-brise qui englobe le cockpit, semblable à un joyau aux multiples facettes, situé en façade de la structure. Le décor le plus élaboré sur le Prometheus est sans doute celui des quartiers de Vickers, qui s’apparentent davantage à un appartement cossu de la Cinquième Avenue qu’à une cabine dans un véhicule interstellaire. L’espace est de toute beauté, avec des meubles design, modernes et anciens, dont un piano Fazioli, des lustres Swarovski – et une installation médicale high-tech comprenant une capsule médicale robotique (ou Med-pod), capable de traiter tout besoin médical ou d’intervenir en cas d’urgence chirurgicale. Cette capsule translucide en forme de cercueil figure dans l’une des séquences décisives du film, qui mêle action, terreur et horreur d’une manière encore inconnue au cinéma. Noomi Rapace commente : « Ce qui se passe à cet instant est simplement le pire que l’on puisse – ou que l’on ne puisse pas… – imaginer. »

Les autres décors intérieurs du Prometheus comprennent un laboratoire où l’équipage apporte ce qu’il découvre pour examen ; la salle de préparation où l’équipage s’habille en vue de leur mission ; les quartiers d’hyper-sommeil où David surveille l’équipage durant leur voyage de deux années vers la planète ; le mess avec son équipement high-tech ; et les quartiers de l’équipage. Les spectaculaires décors créés par Arthur Max pour donner vie à la planète extraterrestre comprennent une Pyramide qui renferme le Juggernaut, un vaisseau semblable à celui en forme de croissant que l’on peut voir naufragé dans ALIEN, LE 8e PASSAGER. Constitué de séries de salles, de couloirs et de tunnels reliant les espaces les uns aux autres – retravaillés par la suite en postproduction – l’immense espace est aussi vaste que l’Empire State Building. C’était un tel dédale que certaines personnes de l’équipe du film y ont égaré leurs affaires…

À l’extérieur, sur le backlot de Pinewood, Arthur Max et son équipe ont construit le garage du Prometheus, l’un des trois décors qui se trouvent sous le corps principal du vaisseau. Ce décor énorme accueille les véhicules de l’équipage, que la production a construits de A à Z. Le chef décorateur explique : « Nous avons dû créer des véhicules qui pourraient réellement être conduits en terrain hostile, sur une surface accidentée, vallonnée et rocailleuse. Il nous fallait des moyens de transport suffisamment industriels pour fonctionner dans ces environnements mais qui possèdent en même temps des caractéristiques futuristes. » Il a fallu onze semaines pour créer ces véhicules robustes, équipés de technologies de pointe, d’éclairages LED et de sièges rembourrés, le tout avec une finition métal étincelante.

Après 15 semaines de tournage à Pinewood, les acteurs et les techniciens se sont rendus en Islande pour tourner les séquences clés et le prologue. Sur le site d’Hekla, la production a pu filmer des scènes d’action intense, tandis que l’un des volcans les plus actifs menaçait de faire éruption. Des scènes additionnelles ont été tournées aux spectaculaires chutes de Dettifoss.

Une autre collaboratrice fréquente de Ridley Scott, la chef costumière oscarisée Janty Yates, a relevé des défis aussi redoutables que ceux auxquels a été confronté Arthur Max. Elle raconte : « Pour les combinaisons spatiales, Ridley tenait à éviter le style gonflé façon NASA que le public connaît trop bien. Il désirait un look plus linéaire, nous avons donc adopté une approche inédite pour le design qui utilise les percées dans le domaine biomédical de la peau artificielle et des divers matériaux pour créer une tenue crédible en termes de légèreté, de souplesse et de confort utilisable dans n’importe quel environnement extraterrestre. » Chaque costume est constitué de la combinaison extérieure, d’une sous-couche de néoprène, d’un empiècement sur lequel vient se fixer le casque, et d’un sac à dos. Ridley Scott nous a demandé un casque en forme de globe sans points aveugles. Chaque casque est équipé de 9 écrans vidéo fonctionnels et d’éclairage ; l’alimentation en oxygène se fait par deux ventilateurs fonctionnant avec des batteries placées dans le sac à dos. L’extérieur du casque comporte une torche et des caméras HD avec émetteur et système d’enregistrement. Le costume que porte David à bord ressemble à la tenue des membres d’équipage humains, mais il comporte de fines lignes qui lui donnent un look plus linéaire. Charlize Theron porte un très beau tailleur en soie et mohair d’un gris froid. Janty Yates explique : « Vickers est la reine des glaces. Notre vision de ce personnage a toujours été celle d’une silhouette aussi sculpturale que possible. » Gardant à l’esprit l’équivalent dans la marine de Janek, Janty Yates a donné à Idris Elba une veste de toile huilée qui donne l’impression qu’il est aux commandes d’un navire depuis des années. Logan Marshall-Green dans le rôle de Holloway a un look casual confortable, intemporel, avec son sweat à capuche, son pantalon thaï et ses tongs.

Les nouvelles créatures que l’on découvre dans le film sont nées du travail du Superviseur créatif des effets créatures et des maquillages spéciaux, Neal Scanlan, et du Superviseur des prothèses, Conor O’Sullivan. Ridley Scott note : « Nous présentons l’évolution de ces créatures d’une manière logique et biologique. » Neal Scanlan ajoute : « Chaque stade du cycle de la vie d’une créature a un but précis. Pour notre xénobiologie, nous avons introduit de nouveaux éléments qui ne rejoignent pas forcément ceux d’ALIEN, mais qui possèdent en quelque sorte un ADN similaire. Ridley puise beaucoup de ses références dans la nature – les plantes, les végétaux, les créatures marines et d’autres animaux. Rien n’est inventé. »

PROMETHEUS est le premier film que tourne Ridley Scott en numérique et en 3D, un format dont il a adopté les challenges techniques comme les possibilités esthétiques. Ridley Scott et Dariusz Wolski ont employé cette technologie pour souligner l’action et le frisson dans de petits espaces confinés, aussi bien que dans de vastes paysages.

En revenant au genre qu’il a contribué à définir, Ridley Scott continue à repousser les frontières de la narration, à la fois au plan visuel et au plan thématique. Il note que ce qui l’intéresse, c’est « l’approche globale », de la structure de l’histoire au casting, des décors et des costumes à de nouvelles manières de raconter une histoire. Et si le célèbre cinéaste excelle à vous faire hurler de terreur, il ne perd jamais de vue un objectif plus vaste. Il conclut : « Lorsque vous aurez vu PROMETHEUS, vous aurez vécu quelque chose de complètement inattendu. »

La suite de ce dossier – dont nos interviews exclusives - paraîtra prochainement sur ESI !



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