[Retrouvez la première partie de cet entretien]

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Avez-vous joué à nouveau avec les distorsions temporelles survenues dans le premier épisode, afin de modifier certains autres « canons » de l’univers de STAR TREK ?

L’avantage que nous donne cette distorsion temporelle, c’est de pouvoir libérer davantage les auteurs et de leur offrir la possibilité de nous proposer toutes les idées qu’ils ont envie de développer. Bien sûr, cela ne nous empêche pas d’aimer faire des allusions à certaines répliques ou à des situations célèbres de l’univers « classique » de STAR TREK, tout en prenant garde à ce que ces clins d’oeils n’entravent pas le récit. Mais en tous cas, il n’y a pas de voyage temporel dans cet épisode.

Comment les relations entre les personnages évoluent-elles cette fois-ci ? Avez-vous l’objectif de présenter tous les protagonistes principaux dans leurs rôles « classiques » à la fin du 3ème épisode, à l’instar du James Bond incarné par Daniel Craig, que l’on a vu évoluer de CASINO ROYALE à SKYFALL ?

Dans le premier film, nous avons montré comment tous ces personnages se rencontraient pour la première fois et comment ils « cohabitaient » au cours d’une grande aventure. Au début de ce second épisode, même si des liens se sont créés, Kirk et Spock sont encore loin d’être devenus des amis, comme vous avez pu le constater. Pourtant, cet équipage devient peu à peu une famille, sans s’en rendre compte, et nous les observons pendant que ce processus se déroule. Pour l’instant, je n’ai encore aucune idée de la manière dont nous aborderons le 3ème volet, et si nous irons jusqu’à établir des liens d’amitiés très forts à ce moment-là… Dans INTO DARKNESS, les membres du groupe s’entendent plutôt bien, même si certains, comme Spock, ne se laissent pas « apprivoiser » facilement. Mais cette évolution fait partie de la saga des personnages, et du plaisir que l’on aura à les voir changer d’épisode en épisode. Je pense que quand on découvre le film, on est frappé par le fait que l’on prend beaucoup de plaisir à voir Kirk et Spock agir ensemble, justement parce qu’ils sont complètement différents l’un de l’autre. C’est ce mélange « électrique », ce conflit de personnalités qui rend ces scènes intenses, surprenantes et savoureuses. Et cette opposition flagrante nous dispense aussi d’avoir à raconter aux spectateurs comment ces personnages se sont rencontrés dans le premier épisode, car on comprend tout de suite qu’ils sont contraints de travailler ensemble au sein du même équipage, en dépit du fait que leurs méthodes soient totalement différentes. Pour revenir à votre question, nous avons déjà discuté dans les grandes lignes de la manière dont les personnages pourraient évoluer, mais rien de spécifique n’a été établi pour le prochain épisode.

Comment Kirk et Spock évoluent-ils au cours de cette aventure ?

Kirk a encore du mal à trouver sa place au sein de la hiérarchie au début de cette histoire. Même s’il a le rang de capitaine, il agit toujours comme une tête brûlée, en s’accommodant du règlement à sa manière…Il a tendance à se croire infaillible, à l’abri de toute erreur. Spock, de son côté, respecte le règlement de manière trop rigide. Au lieu d’écouter ce que lui dicte quelquefois son instinct terrien et de se laisser la liberté « d’improviser », il a tendance à penser qu’il n’y a que 2 manières de faire les choses : agir « bien », de manière logique et selon les règles, ou mal, en sortant de ce cadre. Ces 2 attitudes diamétralement opposées vont créer de nouvelles tensions entre Kirk et Spock dès le début du film. Mais ils vont faire un nouveau bout de chemin ensemble et avoir ainsi plusieurs occasions de comprendre le point de vue de l’autre.

La notion de sacrifice a toujours été importante dans l’univers STAR TREK. Avez-vous songé à tuer l’un des personnages principaux, pour bénéficier d’un moment fort à la STAR TREK 2 LA COLERE DE KHAN  dans ce film ? Est-ce la raison pour laquelle le prologue a été conçu ainsi, avec ce moment où Spock est prêt à mourir pour mener à bien sa mission ?

Cela fait bien sûr partie des idées que nous avons évoquées parmi des milliers d’autres, tout en sachant qu’elles ne sont pas vraiment applicables dans la réalité, car on nous a confié des personnages qui sont des icônes…pour que nous en prenions soin ! Il peut arriver que des idées folles soient évoquées par les auteurs, parce qu’il est sain de « tout mettre sur la table », sans tabou, quand on initie un projet. Mais dans ce film, nous poussons la notion de sacrifice à ses limites et même au-delà. Cette histoire est vraiment étonnante, captivante, et je crois qu’elle réserve de belles surprises aux spectateurs.

Comment avez-vous travaillé avec Benedict Cumberbatch pour rendre son personnage et ses pouvoirs aussi effrayants que possible ?

Benedict est un véritable caméléon. En le voyant travailler, je le voyais passer par toute une série d’attitudes différentes en un clin d’œil. Quand vous le rencontrez, Benedict est un garçon aimable et extrêmement sympathique. Mais quand il se mettait à interpréter Harrison, son personnage, c’était comme si quelqu’un avait actionné un bouton dans son esprit, et il devenait instantanément terrifiant. Dès que l’on criait « Coupez ! » il était à nouveau charmant. C’était absolument stupéfiant à voir. Il a auditionné pour nous via son IPhone, en jouant pendant qu’un de ses amis tenait l’appareil. Et croyez-moi, il a réussi à nous effrayer même sur un petit écran d’IPhone ! (rires)

Le film a-t-il été tourné en résolution 4K et en 3-D native ?

STAR TREK INTO DARKNESS a été tourné à la fois en 35mm anamorphique et au format Imax, mais pas en relief. Et il y a une raison pour cela : quand James Cameron a tourné AVATAR avec sa caméra, il l’avait mise au point spécialement pour ce projet. Mais ces caméras Fusion 3D ont également des limites dont on parle peu : il faut notamment éviter de placer des objets au premier plan, ce qui contraint la mise en scène. Et si vous avez envie de « secouer  la caméra » pour donner l’impression que l’on filme pendant qu’une catastrophe se produit, cela donne des résultats épouvantables en relief. En étudiant le problème, nous nous sommes rendus compte qu’au moment de la post-production des effets visuels, les différentes parties de l’image réunies pour créer un plan composite sont de toutes manières « converties » en relief à ce moment-là. Si vous employez les bonnes personnes pour gérer la conversion de l’ensemble des plans, vous êtes plus libre de mettre en scène le film comme vous l’entendez que si vous tournez directement en relief. Vous pouvez même choisir entre différentes options de relief en post-production, plutôt que d’être contraint de trancher au moment du tournage. Je crois que les gens qui verront le film seront très surpris d’apprendre qu’il n’a pas été tourné en relief, tant le rendu est bon !

Et pour conclure, l’inévitable question : allez-vous travailler avec JJ Abrams sur STAR WARS EPISODE 7 ?

Oui.

Avez-vous déjà lancé la production du film ?

Non, pour l’instant nous en sommes encore à la phase de développement du script.

Kathleen Kennedy a déclaré que George Lucas jouerait un rôle de consultant sur les prochains épisodes, et qu’il « serait son Yoda ». On ignore comment Lucas a pris cette comparaison, mais nous nous demandions si vous alliez aussi consulter l’une des autres grandes forces créatrices de STAR WARS sur les 2 premiers épisodes de la saga originale, le producteur Gary Kurtz ? il a apporté des idées fantastiques à STAR WARS et à L’EMPIRE CONTRE-ATTAQUE…

Je n’en doute pas… Pour ne rien vous cacher, nous venons à peine de découvrir comment la production de ces nouveaux STAR WARS va s’organiser. Ce processus n’a débuté que depuis quelques semaines à peine. Ce que vous suggérez est une excellente idée, de toute évidence, et je la répercuterai au reste de l’équipe... Nous avons des conversations sur les gens qui ont participé à la saga originale, et nous en avons déjà rencontré certains. Lawrence Kasdan, comme vous le savez, est déjà impliqué dans le projet. Même si Kathy n’a pas travaillé sur les précédents STAR WARS, je dois dire que je suis extrêmement impressionné et heureux de pouvoir collaborer avec elle, car j’ai la plus grande admiration pour son extraordinaire carrière de productrice. A chaque fois que je me trouve à ses côtés et que je la vois agir, je me dis « Bon sang, j’ai vraiment des progrès à faire en tant que producteur ! », tant elle me sidère par l’intelligence de ses décisions. Comme JJ, je n’en apprécie que plus d’avoir le privilège d’être invité à entrer dans leurs nouveaux projets pour STAR WARS. C’est une expérience vraiment inattendue, et pour des gens de notre génération, c’est surréaliste. Nous sommes comblés !

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