Exclusif : Dans les coulisses du CHOC DES TITANS - Entretien avec Jason Flemyng (Calibos)
Article Cinéma du Vendredi 16 Avril 2010

Retrouvez les premières parties de notre visite du tournage


C’est maintenant Jason Flemyng que nous rencontrons. Il surgit comme un diable dans la pièce où nous nous trouvons, maquillé de la tête aux pieds en Calibos ! Toujours facétieux, il prend la voix d’un vieil acteur anglais et dit d’un ton pompeux « Quand je jouais avec Laurence Olivier… », pour se moquer de son apparence et nous prouver, si besoin était, son sens de l’autodérision ! C’est pour nous un grand plaisir de le rencontrer, car Flemyng, né en 1966 à Londres, est un vrai fan de fantastique et de SF qui n’a jamais raté une occasion d’apparaître dans les films et séries que nous aimons.  Dès le début de sa carrière, on le voit dans deux épisodes des AVENTURES DU JEUNE INDIANA JONES (1992), dans l’adaptation du LIVRE DE LA JUNGLE réalisée par Stephen Sommers (1994), puis dans la série inspirée du film LES PREDATEURS (1997). Il retrouve Stephen Sommers pour l’excellent DEEP RISING (UN CRI DANS L’OCEAN -1998) , rejoint le casting prestigieux (Woopy Goldberg, Ben Kingsley, Martin Short, Gene Wilder, etc.) du téléfilm à gros budget ALICE AU PAYS DES MERVEILLES (1999) et devient le héros de BRUISER (2000), réalisé par le grand George A. Romero, incarnant un homme humilié par tout son entourage, qui décide de se venger de manière sanglante le jour où il pose un masque blanc sur son visage. Fidèle à ses passions, Jason Fleyming fait partie des acteurs qui lisent de grandes nouvelles d’épouvante, face à la caméra, dans la série THE FEAR (2001). C’est en 2003 qu’il incarne le docteur Jeckyll et le monstrueux Mr Hyde (en portant un incroyable costume doté de bras mécaniques géants, conçu par Steve Johnson) dans LA LIGUE DES GENTLEMEN EXTRAORDINAIRES, de Steve Norrington. L’année suivante, Il tient le rôle-titre du film français ATOMIK CIRCUS, LE RETOUR DE JAMES BATAILLE, réalisé par Dennis et Thierry Poiraud, avec Vanessa Paradis en co-star de ce mélange improbable d’humour de SF et de gore qu’un scénario indigent condamna à l’échec. Flemyng reprend ensuite le rôle du professeur Bernard Quatermass dans le téléfilm THE QUATERMASS EXPERIMENT (2005), joue dans la jolie fable STARDUST  (2007) de Matthew Vaughn, et devient l’un des détectives de MIRRORS (2008) d’Alexandre Aja. Il joue le père du héros dans L’ETRANGE HISTOIRE DE BENJAMIN BUTTON (2008), puis reprend le rôle principal de la sympathique série PRIMEVAL (NICK CUTTER ET LES PORTES DU TEMPS) en 2009. Aujourd’hui, c’est un double rôle qu’il tient dans LE CHOC DES TITANS, celui du roi Acrisius transformé en monstrueux Calibos, par la colère de Zeus…

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Jason, en vous voyant métamorphosé ainsi, et en pensant à votre transformation en Mr Hyde de LA LIGUE DES GENTLEMEN EXTRAORDINAIRES, on a tendance à se dire que vous aimez vous grimer, quitte à porter des maquillages assez inconfortables…

Non, il ne l’est pas tant que ça. En fait, ce qui se passe, et ce n’est d’ailleurs pas forcément une bonne chose, c’est que quelqu’un, quelque part,  a décidé que Jason Flemyng pouvait supporter n’importe quel type de prothèses tout en ne jouant pas trop mal. Donc, quand on se pose la question « Mais à quel type un peu givré pourrait-on proposer ce rôle avec ce maquillage invraisemblable ? », mon nom fait invariablement partie de la liste ! (rires) En tous cas, c’est ce qui se passe depuis quelques années…

Combien de temps la séance de maquillage complète dure-t’elle ?

En comptant tout, c’est à dire la pose des prothèses corporelles et faciales, et l’habillage, cela prend un peu plus de 4h30.

Que faites-vous pour patienter pendant tout ce temps ?

Comme vous vous en doutez, je lis les grands romans de la littérature russe…Et de temps en temps, je joue à la Playstation ! (rires) Sérieusement, j’en profite pour voir des films que j’ai raté au cinéma ou pour me mettre dans un état de méditation transcendantale, ce que j’arrive à faire assez aisément. Je me dis « Qu’arriverait-il si je devenais minuscule et si je pouvais voler ? » et mon esprit s’évade loin de la loge  de maquillage ! (rires)

Comment incarnez-vous Calibos ?

J’avais prévu de lui donner une voix grave et rocailleuse, mais étant donné que nous utilisons des ventilateurs géants et des machineries assez bruyantes pendant le tournage, nous avons encore le temps d’aller dans une autre direction, puisqu’il faudra réenregistrer les dialogues pendant la post-production.

Votre personnage a un destin plutôt tragique. Jouez-vous Calibos comme un personnage brisé, accablé par le sort ?

C’est vrai qu’il n’a pas de chance ! Zeus se transforme en Acrisius pour séduire sa femme et lui faire l’amour. Le vrai Acrisius rentre alors chez lui et découvre que son épouse le trompe avec Zeus. Ivre de rage, il décide de se venger de cet adultère, et subit alors la colère de Zeus, qui le foudroie et le transforme en monstre…Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce pauvre Acrisius a été floué dans cette histoire. Donc, oui, pour répondre à votre question, il y a un peu de tristesse en lui. Mais en ayant un maquillage aussi imposant sur le visage, on a un peu plus de mal à faire passer toutes les nuances de la tragédie !

Votre maquillage semble pourtant très souple, et capable de suivre toutes vos expressions…

Oh oui, le maquillage est fantastique. C’est un travail exceptionnel, avec des prothèses très fines. Il est très léger, aussi. Je n’ai pas à me plaindre. D’autant plus qu’il ressemble assez à l’aspect que j’ai naturellement, après une nuit un peu trop arrosée ! (rires)

Depuis le début de cet entretien, vous avez touché à plusieurs reprises le bas de votre prothèse faciale. Y a t’il une raison à cela ?

Oui, comme je transpire sous la prothèse, il se forme une accumulation de gouttes de transpiration que je peux évacuer en tirant ici !

Comment votre peau supporte t’elle ces séances de maquillages quasi-quotidiens ?

Je ne peux pas me permettre d’avoir des rougeurs ! (rires) Les produits que l’équipe de maquillage emploie sont conçus pour ne pas irriter la peau, mais forcément, au bout de six jours consécutifs de maquillage et de démaquillage, elle en prend un coup… Quand vous êtes maquillé, la seule attitude à avoir est d’être patient et de sourire quoi qu’il arrive. C’est comme cela que j’agis.

Vous portez aussi des prothèses dentaires, d’après les photos de vous que nous avons vues dans l’atelier de maquillage…

Oui, ce sont des dents un peu pointues, avec lesquelles je mords Sam Worthington, en emportant un bout de chair de son bras, d’ailleurs. (rires) Que je recrache par terre dès qu’il s’enfuit…(rires)

Mais il n’y a pas que le maquillage facial : vous portez aussi des prothèses sur un bras, une jambe et un pied… Ce n’était pas trop dur à supporter quand vous tourniez en haute altitude ?

Vous savez, quand nous étions là-haut, nous devions tourner une scène où le groupe de Persée me poursuit. Sam Worthington, qui doit avoir 13 ans de moins que moi, me disait  (Jason Fleyming prend l’accent australien de Worthington) « Hé « Mate », si je te rattrape pendant la course, je te tue ! » (rires) Je lui répondais « Okay Sam, cette réplique n’est pas dans le texte, mais faisons comme ça ! » Nous avions à descendre une pente à pic sur plus de cent mètres, ce qui était loin d’être facile à cette altitude. Mais ce que Sam ne savait pas c’est que j’ai l’habitude de courir le marathon, alors que lui aime boire et fumer ! (rires) Nous nous sommes donc lancés dans cette course. Et à chaque fois qu’il se rapprochait de moi, il fallait que je bondisse pour lui échapper et descendre plus vite plus bas. Nous avons tourné la scène quatre fois de suite, et j’ai vu Sam s’allonger par terre, à bout de souffle à cause du manque d’oxygène et aussi parce qu’il faisait plus de 35 degrés. En en regardant sous ses sandales, je me suis rendu compte qu’on lui avait cousu en dessous d’épaisses semelles en caoutchouc, dignes de celles d’une bonne paire de baskets ! Moi, je n’avais qu’une semelle de cuir épaisse d’un côté, et ma prothèse de pied difforme de l’autre ! Parce qu’il est la star, on lui avait fabriqué une paire de « Nike air » sur mesures ! Je lui ai dit « Mais regarde tes chaussures ! Pas étonnant que tu sois capable de me rattraper en portant ça aux pieds ! » (rires)

Connaissiez-vous bien LE CHOC DES TITANS original ?

Bien sûr ! C’était l’un de mes films favoris, tout comme JASON ET LES ARGONAUTES, et les autres films de Ray Harryhausen. En fait, quand nous avons commencé à travailler sur ce maquillage, je me suis rappelé que Calibos, dans le film original, portait un anneau d’or à une oreille. J’ai désespérément tenté de convaincre la production de me laisser porter une boucle d’oreille, pour rendre hommage au personnage original, mais ils n’ont pas voulu en entendre parler. En revanche, je pense que vous vous souvenez du hibou mécanique de l’original, dont on se demandait bien ce qu’il venait faire au milieu de cet univers de monstres. Il agissait de manière un peu stupide, comme un faire-valoir comique. Dans cette version, il y a une scène dans laquelle un des hommes de Persée ouvre un coffre pour chercher du matériel avant d’entamer le voyage. Il en ressort le hibou mécanique de 1981, et quand Persée le voit, il lui dit « Laisse-le là ! » (rires). Il y a d’autres petites touches dans le film, qui permettent de rendre hommage à l’original, et qui feront plaisir aux cinéphiles et aux amateurs de fantastique.

Retrouvez la suite de cet entretien !


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