Dossier AVATAR - Exclusif : Entretien avec Zoe Saldana (Neytiri)
Article Cinéma du Dimanche 09 Mai 2010

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Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Les amateurs de Science-Fiction ont pu découvrir le visage de la ravissante Zoe Saldana dans STAR TREK de JJ Abrams. Elle y reprenait avec talent le rôle de Uhura, la responsable des communications du vaisseau Entreprise. Mais c’est paradoxalement sa prestation “masquée” derrière le visage virtuel de Neytiri, dans AVATAR, qui lui a valu de devenir une vedette de premier plan. ESI a rencontré Zoe Saldana afin d’évoquer cette extraordinaire experience, dans laquelle l’actrice s’est totalement investie…

Le personnage que vous incarnez dans AVATAR a une nature sauvage. Est-ce aussi un des traits de votre caractère ?

Je crois que oui, car quel que soit le rôle que vous tenez, même si vous essayez de ne pas transférer votre personnalité en jouant, il y a toujours quelque chose de vous qui finit par transparaître. C’est pratiquement inévitable. Et l’inverse est vrai aussi, à la fin d’un tournage. Vous emportez un peu du personnage avec vous.

Ce doit être formidable de jouer un des personnages féminins forts filmés par James Cameron, après Sarah Connor, Ripley, et Rose…

J’en suis extrêmement honorée. Les gens parlent souvent de Sarah Connor, de Ripley, de Rose dans TITANIC, sans oublier le personnage de Jaimie Lee Curtis dans TRUE LIES, car elle aussi savait se battre ! Et si Neytiri pouvait se retrouver à leurs côtés dans l’esprit des cinéphiles, ce serait fantastique. En tant que femme, c’est très réconfortant de travailler avec un cinéaste qui sait écouter son côté féminin. On peut se demander pourquoi Jim a écrit tant de rôles magnifiques pour les femmes. Eh bien, c’est tout simplement parce qu’il les comprend à merveille, les respecte, et éprouve de la considération pour ce qu’elles sont. J’ai le sentiment qu’il ne voit pas les femmes en tant que telles, mais qu’il les considère d’abord comme des êtres, au même titre qu’il ne colle pas une image masculine toute faite sur ses personnages d’hommes.  A ses yeux, nous sommes tous des êtres humains qui possèdent les mêmes qualités. Mais il faut aussi posséder soi-même une grande vulnérabilité, une grande sensibilité, pour accepter son côté le plus fragile, et parvenir à comprendre ce que c’est d’être à la fois fort et vulnérable. Je crois que Jim est parfaitement conscient de sa force, de son endurance, et de sa fragilité, et que c’est cette qualité particulière qui lui permet de créer des personnages qui possèdent tant d’humanité.

Où avez-vous grandi ?

Dans le quartier populaire de Queens, à New York. Puis je suis partie dans les Caraïbes, pour suivre pendant sept ans les cours d’une école privée, en République Dominicaine.

Comment James Cameron vous a t’il décrit le personnage de Neytiri quand vous l’avez rencontré pour la première fois ?

C’était assez amusant en fait. J’étais en train de lire le script du film dans les locaux de sa société de production, et quand il est entré, mon cœur s’est mis à battre très fort. Il est arrivé avec Jon Landau, le producteur, s’est dirigé vers moi, m’a regardé en me serrant la main, et m’a dit « Bonjour Zoe. Je suis Jim Cameron. Enchanté de faire votre connaissance. ». Et immédiatement après, il s’est tourné vers Jon et lui a dit « Elle ressemble à Neytiri. » Je n’en étais qu’à la moitié du script, mais il m’a fait visiter ses locaux, et m’a montré des illustrations qui représentaient les Na’vis, Neytiri et le monde de Pandora. Ensuite, une fois que j’ai terminé de lire le script, je suis allé discuter avec lui dans son bureau. Nous avons parlé pendant deux bonnes heures, et pendant tout ce temps-là, il observait attentivement mes expressions et les gestes que je faisais avec les mains. Certainement pour voir ce qu’il faudrait que je corrige plus tard, dans ma gestuelle, pour incarner le personnage. Il m’a dit « Neytiri est une guerrière. Elle est très forte. N’hésitez pas à vous servir de ce que vous avez vécu en grandissant dans le Queens pour exprimer cette force et cette indépendance. » Quand il m’a dit cela, j’ai eu le sentiment que je tenais le personnage. Neytiri est une fille qui aurait pu grandir dans n’importe quel quartier populaire du monde, et qui est devenue ce qu’elle est grâce à sa force de caractère. Elle est à la fois très dure, indomptable, fragile et innocente. Elle a un côté totalement adulte, car elle est capable de survivre dans des conditions extrêmes et peut affronter des dangers terribles, mais elle peut aussi se comporter comme une enfant naïve. C’est l’une des caractéristiques des Na’vis : ils ne mentent jamais, ne cachent rien de ce qu’ils pensent. Il fallait donc réussir à faire passer tout cela dans mon interprétation, malgré que je sois une humaine, avec tous les défauts inhérents à cet état ! (rires)

Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce projet ?

Le fait que ce soit un film de James Cameron. Il tourne un film qui marque l’histoire du cinéma tous les dix ans, et qui devient aussitôt une icône de la culture populaire. J’ai immédiatement répondu « oui » parce qu’une opportunité pareille est extraordinaire, et ne se présente pas à vous très souvent. Vous savez d’emblée que quel que soit le personnage que James va vous demander d’incarner, et quelle que soit l’histoire qu’il a prévu de raconter, ce sera passionnant, rempli d’émotions, spectaculaire, et soigné jusque dans les moindres détails. Quand j’ai lu le scénario, j’ai été soufflée. Etant née dans les années 80, Sarah Connor et Ellen Ripley sont mes Mick Jaggers. Elles étaient mes stars du rock à moi, mes pirates, mes héroïnes. Je n’aurais pas été surprise de les voir marcher sur l’eau !

Comment avez-vous réagi en entendant James Cameron vous annoncer qu’il vous confiait le rôle de Neytiri ?

C’est le genre de coup de fil dont on se souvient pendant toute sa vie. C’est un sentiment merveilleux, bien sûr. Et en même temps, j’étais pétrifiée en pensant à tout ce qu’il allait falloir accomplir. J’étais à la fois heureuse et terrifiée !

Comment avez-vous développé de nouvelles expressions et de nouveaux mouvements pour devenir une Na’vi ?

Il m’a fallu m’y consacrer entièrement, prendre le temps de chercher des idées, puis m’entraîner. Je savais qu’il fallait que j’en passe par là parce que je me connais. Je sais quelles sont mes capacités d’assimilation, mais je savais aussi qu’il fallait que je développe ce comportement extraterrestre assez longtemps pour qu’il devienne spontané, et semble complètement naturel. Je voulais arriver fin prête au moment du tournage, afin de pouvoir me consacrer uniquement au travail avec Jim et à mes scènes avec Sam. Je voulais ne plus penser qu’à l’histoire, et éviter que mon jeu soit parasité par des réflexes typiquement humains, ce qui m’aurait contraint à rester constamment sur mes gardes pour ne pas hocher la tête, par exemple, au cours d’une conversation. Il a vraiment fallu que je me déshumanise.

Est-ce que vous deviez souvent reprendre une scène à cause d’un geste trop humain qui vous avait échappé ?

De temps en temps, oui. Et quand Jim ou moi nous en rendions compte, on entendait jaillir des jurons ! C’était frustrant de gâcher une scène à cause de cela. Quelquefois, nous ne nous en rendions pas compte tout de suite, mais seulement au visionnage, quand Jim disait ce qui lui plaisait dans la scène, jusqu’au moment où il s’interrompait parce qu’il avait remarqué que je hochais la tête. Il fallait rester très concentré, et s’entraîner tout le temps.

Combien de temps vous a-t’il fallu pour réussir à vous débarrasser totalement de ces réflexes conditionnés ?

Six mois. Je me souviens que j’ai obtenu le rôle en septembre 2006. Je vivais encore à New York à l’époque, et Jim m’a appelé pour m’annoncer la bonne nouvelle. Je lui ai demandé à quel moment le tournage devait commencer, et il m’a dit que ce serait en mars/avril 2007. Je lui ai dit que je voulais commencer à m’entraîner immédiatement, sans perdre un instant. Jim m’a dit « Ça me fait plaisir de t’entendre dire cela, mais crois-tu que tu vas pouvoir y arriver ? ». Je lui ai répondu que je souhaitais qu’il m’entraîne de manière intensive, jusqu’au point où je me mettrai à crier pour lui dire d’arrêter ! Je sais comment je fonctionne. Je suis aisément distraite par un détail qui cloche, parce que, comme Jim, j’ai tendance à avoir l’obsession de la perfection. Quand j’ai un obstacle à surmonter, je m’y attaque par tous les moyens, jusqu’au moment où il est franchi.

Quelles recherches avez-vous faites pour développer votre rôle ?

J’ai regardé beaucoup de documentaires animaliers sur les chaînes Animal Planet et National Geographic. Essentiellement des programmes consacrés aux félins et aux fauves. Je me suis aussi intéressée à l’intelligence et au caractère paisible des baleines. Les dauphins m’ont fascinés pour leur innocence et leur joie de vivre. Il m’arrivait de me réveiller en pleine nuit, en pensant « Gerboises !  Allons donc voir comment se comportent ces animaux-là ! » (rires) J’ai aussi un neveu et une nièce qui avaient respectivement trois et quatre ans au moment où je faisais ces recherches. En les observant, j’ai remarqué des comportements étonnants, qui n’étaient pas entravés par le jugement, ni par la crainte d’être mal considéré. Les deux petits ne tenaient aucun compte des conséquences futures de certaines de leurs actions.

Quelles ont été les préparations techniques auxquelles vous avez dû vous soumettre avant le tournage, afin que l’on finalise l’effigie 3D de Neytiri ?

On a moulé nos visages ainsi que le cou et le haut de nos épaules, et ensuite, on nous a scannés en 3D des pieds à la tête. (Rires) C’est assez drôle d’ailleurs, quand j’y repense, car Sam et moi nous étions tout contents de nous retrouver dans cette posture d’animaux de laboratoire que l’on soumet à des séries d’expériences étranges ! On nous a scannés de différentes manières toutes les trois semaines. Il a fallu que j’y retourne, car ils avaient du mal à lire les pores de ma peau à l’image. Chaque texture de peau est différente, et pour que le système de capture d’expression fonctionne, il fallait vraiment qu’ils puissent lire des détails microscopiques. Jim voulait que l’on parvienne à dupliquer les moindres caractéristiques de nos visages, jusqu’à nos petites rides, et nos pores, afin que nos personnages Na’vi soient exactement comme nous. Jim n’allait pas se contenter de capturer les mouvements : il souhaitait capter les émotions, jusque dans leurs nuances les plus subtiles. J’oubliais de vous dire qu’on a également moulé nos dents, car à un moment, il était question que nous ayons des canines plus longues. Nos oreilles ont subi le même sort. Les longues oreilles de nos personnages sont donc elles aussi inspirées des nôtres. Même si certaines procédures étaient un peu contraignantes, nous ne nous plaignions jamais, car tout nous semblait nouveau et fascinant. Nous étions en train d’entrer dans un monde nouveau, et cela nous passionnait au plus haut point !

Vous jouez un personnage très athlétique, toujours en mouvement, qui est capable de se défendre contre des animaux dangereux. Quel type d’entraînements physiques avez-vous pratiqués pour arriver en pleine forme sur le tournage ?

J’ai pratiqué la danse pendant longtemps, et je dois dire que cela m’a beaucoup aidé, et que Jim en a tenu compte lorsqu’il m’a choisie. Comme je me suis entraînée pendant des années, je savais très bien ce qu’il fallait que je fasse pour être à nouveau dans une forme optimale. Neytiri est une créature qui a un comportement très félin : elle rampe tout en se cachant, afin d’observer ce qui se passe, elle est agile, bondit souplement. Etant donné que sa colonne vertébrale est prolongée par une longue queue, elle ne marche pas de la même manière qu’un être humain. A la lecture du scénario, j’ai tout de suite compris qu’il allait falloir que je travaille ma musculature et ma souplesse. Et en tant que perfectionniste, j’ai adoré aller jusqu’au bout de cette démarche pour devenir ce personnage. Jim et Sam fonctionnent de la même manière, et nous nous entraidions pour atteindre nos buts communs.

Neytiri est bleue, très grande, et pourtant, elle réussit à être très séduisante, et même sexy. Comment avez-vous réussi à faire passer ce côté attirant du personnage ?

Je n’en sais rien. J’étais totalement investie dans le personnage, et je pense que sa forte personnalité transparaît et exerce une séduction, même si elle est bleue et mesure plus de trois mètres de haut. Elle a plus de poitrine que moi, pour commencer…(rires) C’est aussi une guerrière.

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