Avatar version longue : Dans les coulisses de Weta Digital, sixième partie - Rencontre exclusive avec Joe Letteri
Article Cinéma du Vendredi 14 Octobre 2022

A l'occasion de la ressortie d'Avatar au cinéma, et en attendant l'arrivée d'Avatar: La Voie de l'eau en décembre, nous vous proposons de redécouvrir ce dossier exclusif!

Retrouvez la précédente partie de ce dossier


Nous nous sommes rendus récemment de l’autre côté de la planète, à Wellington, en Nouvelle-Zélande, pour rencontrer l’équipe de Weta Digital qui venait d’achever les nouvelles séquences de la version longue d’Avatar sous la direction de James Cameron, du producteur Jon Landau et du superviseur des effets visuels Joe Letteri.

Propos recueillis et traduits par Pascal Pinteau

Entretien avec Joe Letteri, Superviseur des effets visuels d’Avatar et de la version longue du film

Combien de créatures inédites va-t’on découvrir dans les nouvelles scènes ?


Eh bien, en plus des sturmbeasts, vous allez découvrir les stingbats (littéralement « les chauves-souris avec des dards », NDLR), dans la scène de l’arrivée de Jake dans la base militaire, puis dans l’école abandonnée. Nous étions très tristes d’avoir dû couper les scènes avec ces créatures de la version cinéma, et nous avons été ravis de les voir revenir dans la version longue.

Comment décririez-vous l’importance que Weta a prise en Nouvelle-Zélande, économiquement et socialement ?

Ici même, au sein de Weta Digital, nous employons plus de 750 personnes, qui viennent de tous les pays du monde. Au début de la société, nous faisions venir beaucoup de gens de l’étranger, parce que nous avions besoin de professionnels expérimentés. Mais au fil des ans, nous avons pu former et employer de plus en plus de néo-zélandais. Aujourd’hui, il y a un meilleur équilibre entre les employés locaux et ceux qui viennent de l’étranger.

L’un des grands rêves des pionniers de la synthése était de parvenir à créer un jour une effigie parfaitement réaliste de Marilyn Monroe, ou d’autres acteurs du passé. Croyez-vous que l’on y parviendra bientôt , avec le développement des techniques de capture de performance ?

Je ne crois pas que cela ait réellement des chances de se produire, parce que je ne pense pas qu’il y ait vraiment une demande pour ce genre de choses. Evidemment, on peut toujours imaginer qu’un script particulier, dont l’action se situerait dans le passé, nécessite que l’on reconstitue un acteur ou une actrice célèbre,  mais en dehors de cela, pourquoi diable voudrait-on faire revivre Marilyn Monroe sur le grand écran ? Que ferait-elle dans un film contemporain ?

Mais indépendamment de votre propre opinion sur ce sujet, il se pourrait qu’on réalisateur ait envie d’inclure Marilyn Monroe dans un film. Si tel était le cas, serait-ce possible actuellement, selon vous ?

Techniquement, ce serait possible, mais si vous n’avez pas Marilyn Monroe dans le costume de capture de mouvement sur le plateau, cela signifie que vous animez l’effigie 3D de Marilyn en utilisant les gestes d’une autre actrice. Sa façon de bouger serait forcément différente. En fin de compte, je ne suis pas sûr que l’on obtiendrait un résultat plus convaincant que si l’on cherchait une actrice ayant déjà une petite ressemblance avec Marilyn, que l’on maquillerait, coifferait et habillerait comme elle. C’est ce que Woody Allen avait fait pour montrer les apparitions d’Humphrey Bogart dans Tombe les filles et tais-toi (Herbert Ross – 1972, NDLR) : il avait eu recours à un sosie qui imitait bien la voix de Bogart, et ces scènes fonctionnaient très bien. Il faut bien faire la différence entre la technologie qui est disponible et les vrais besoins que l’on a pour faire vivre une histoire.

Avez-vous travaillé sur des scènes d’Avatar qui ont été développées sous la forme de storyboard et peut-être même animées, et qui ont été finalement conservées pour Avatar 2 et 3 ?

A vrai dire, nous n’avons strictement aucune idée de ce qui va se passer dans Avatar 2 & 3 ! Je crois que Jim a décidé de montrer toutes les scènes inachevées du premier épisode dans l’édition vidéo que vous allez découvrir. Tout ce que je sais, c’est qu’en évoquant récemment avec lui la suite de la trilogie, il s’est mis à sourire en nous regardant et nous a dit « Vous n’avez pas idée à quel point vous allez être dans le pétrin, les gars ! » (rires)

Il y a eu une révolution technologique entre le premier Terminator et le second, révolution en partie initiée par James Cameron. Pensez-vous qu’il pourrait y avoir une autre révolution entre Avatar et la réalisation des deux épisodes suivants ?

Pas de cette échelle, parce que le premier Terminator a été réalisé avant que les effets visuels soient réalisés numériquement. Terminator 2 est d’ailleurs le premier film dont toute la post-production a été numérique. Tant que nous n’en saurons pas plus sur Avatar 2 & 3, je ne pourrais pas vous répondre plus précisément.

Vous qui avez travaillé sur Jurassic Park, et qui travaillez actuellement sur Tintin, savez-vous ce que Steven Spielberg a pensé d’Avatar ?

Steven a beaucoup aimé Avatar. Il a pensé que c’était une nouvelle révolution dans l’histoire du cinéma. Il a été très impressionné par la manière dont toutes les techniques employées ont été combinées pour raconter un récit passionnant. Nous faisons Tintin avec lui en ce moment, et il est très excité par le procédé de tournage dans le volume, au moyen de la capture de performance et de la simulcam. C’est une adaptation numérique des procédés de tournage classiques.

Steven Spielberg, George Lucas, Peter Jackson et James Cameron sont tous des experts dans l’utilisation des effets visuels, mais James Cameron semble être dans ce groupe celui qui a initié les avancées les plus radicales, comme une sorte de tête brûlée qui voulait à tout prix qu’un film qu’il avait imaginé soit réalisé, même si au moment de sa conception, les moyens de le concrétiser n’existaient pas encore. Pourrait-on dire que James Cameron est l’un des plus audacieux dans ce domaine ?

Vous savez, chacun d’entre eux a sa propre histoire personnelle et sa propre trajectoire professionnelle. Jim a poussé ILM à se dépasser quand il a fait Abyss et Terminator 2,  Steven a été à l’initiative de la création des premiers animaux hyperréalistes réalisés en 3D dans Jurassic Park, et Peter a fait créer Gollum pour la trilogie du Seigneur des Anneaux ! Jim est revenu en tête de peloton en faisant Avatar, mais des réalisateurs d’un tel calibre s’observent toujours les uns les autres pour faire mieux lors de leur projet suivant ! N’oubliez pas que Jim a gardé l’histoire d’Avatar pendant dix ans dans un tiroir avant que la technologie pour réaliser ce film ne soit créée.

La suite de notre entretien avec Joe Letteri sera publiée prochainement sur ESI…

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