[Flashback] Les coulisses d'Alien 3 : Une rude gestation
Article Cinéma du Jeudi 12 Juillet 2018

A l'occasion de l'annonce de la publication - en fin d'année aux États-Unis, par Dark Horse Comics - d'une adaptation en comic book du script (rejeté) d'Alien 3 écrit par William Gibson, nous vous proposons de (re)découvrir le processus de création du tout premier film de David Fincher...

Pour une partie des fans de la saga Alien, le troisième opus représente le début de la fin. Malgré un développement chaotique, David Fincher a pourtant livré une suite honnête – le pire ayant été évité. Découvrons donc les différentes vies d'Alien 3...

Par Pierre-Eric Salard

Si Alien, le huitième passager (1979) est rapidement devenu un film culte, James Cameron a pris les spectateurs par surprise en inscrivant la suite des aventures d'Ellen Ripley dans un tout autre registre. Contre toute attente, l'action frénétique a pris le pas sur la terreur dans Aliens, le retour (1986). Le succès étant au rendez-vous, les dirigeants des studios 20th Century Fox ne tardèrent pas à embrasser l'avenir : il était devenu évident qu'une franchise était née. A Hollywood, on n'abandonne pas une poule aux œufs d'or – même si de l'acide coule dans ses veines ! Walter Hill et David Giler, les dirigeants de Brandywine et producteurs des deux premiers opus de la saga, adhérèrent, bien entendu, aux ambitions du studio. Sauf qu'un éventuel Alien 3 n'a, sur le papier, aucune raison d'exister ! Aliens, le retour clôt parfaitement l'arc narratif d'Ellen Ripley : elle se découvre une fille de substitution, un compagnon potentiel et... survit ! Il est temps de prendre une retraite bien méritée ! La menace représentée par les xénomorphes est, quant à elle, littéralement atomisée ; aucune chance que les aliens - et l'épave du vaisseau du Space Jockey - aient survécu à l'explosion du processeur atmosphérique (quoique que le jeu vidéo Aliens : Colonial Marines nous prouvera le contraire en février 2013). Le tandem à la tête de Brandywine doit donc trouver un moyen de faire revenir Ripley, le fléau extraterrestre et la « Compagnie » Weyland-Yutani sur le devant de la scène. Au lieu d'explorer le mystère du Space Jockey, de menacer la Terre ou de visiter la planète natale des xénomorphes (autant d'arcs narratifs explorés par une série de comics publiée après Aliens, le retour), ils décident de produire une suite directe au film de James Cameron. Sauf que le postulat de départ d'Alien 3 trahit le second volet ! Entre les deux premiers films, l'évolution de Ripley est aussi logique qu'évidente : elle est passée du statut d'unique survivante à celui de héroïne en portant secours à une poignée de rescapés. Alien 3 bouleverse la donne. Lorsque la Reine alien s'est clandestinement introduite à bord du Sulaco, à la fin d'Aliens, le retour, pour une ultime confrontation, la créature a trouvé le temps de pondre un œuf, qui – surprise ! - n'a pas été remarqué par Ripley. Ledit œuf engendre un Facehugger quelques temps après l'épilogue du précédent volet. Ce dernier « féconde » non seulement l’héroïne (mais cela, les spectateurs l'apprennent ultérieurement), mais provoque également un incendie qui à l'origine du décès de ses protégés - et de l'éjection des chambres d'hyper-sommeil du Sulaco qui s’abîment sur la planète Fiorina 161. Il génère, enfin, un ultime xénomorphe. Lorsqu'Alien 3 débute, Ripley est donc l'unique survivante du film précédent – en omettant l’androïde Bishop, pour le moins mal en point ! Le sauvetage de Hicks et Newt s'est finalement avéré inutile. Le chef d’œuvre de James Camera est trahi. Notons que le cinéaste ne dissimulera pas sa déception, qualifiant le décès prématuré de Newt et Hicks de « claque ». « J'ai détesté ce film, c'est aussi simple que ça », déclarait-il en 2003. « Je ne supporte pas Alien 3. Comment ont-ils pu tuer les excellents personnage que nous avions introduit dans Aliens, le retour ? Comment ont-ils pu se débarrasser de la relation maternelle entre Ripley et Newt ? J'espère que j'aurais la chance de rectifier ces erreurs ». Le développement d'Aliens vs Predator l'en empêchera, et il se concentrera sur d'autres extraterrestres, les fameux Na'vi d'Avatar. Il n'aura donc pas perdu au change... Furieux, Michael Biehn, qui espérait reprendre le rôle du Caporal Hicks dans Alien 3, exigera un cachet équivalent à celui qu'il toucha pour Aliens, le retour... pour que son visage puisse seulement apparaître dans le film ! Il n'est certes pas interdit de rétorquer que la perte des proches de Ripley favorise l'émergence d'un nouvel état d'esprit. Sans oublier que cela permet de clore la saga sur un véritable épilogue. Une conclusion définitive... mais surtout artificielle ! « Tuer Newt n'est pas seulement une obscénité », déclara Alan Dean Foster, auteur des novélisations des films. « Cela supprime l'unique raison qui pousse Ripley à rester en vie ! Les cinéastes aiment choquer, même si cela va à l'encontre de la logique et de l'intrigue. Si la chambre d'hyper-sommeil de Newt avait été seulement endommagée et qu'elle était restée en vie, Ripley aurait continué à se battre. La survie de la fillette étant incertaine, le film aurait disposé d'un autre élément de suspense. Enfin, lorsque Newt aurait été plus âgée, sa perspective unique du monde des aliens aurait ouvert d'innombrables possibilités pour des films dérivés ! Walter Hill a refusé toutes mes idées... » Mais dans un univers alternatif, le troisième volet de la saga Alien aurait pu être un film aussi exceptionnel et original que ses prédécesseurs. Ses défauts ne sont pas dû au hasard. Au contraire, Alien 3 a vécu ce qu'on appelle à Hollywood « l'enfer du développement ». Plus d'une dizaine de scénaristes ont écrit autant de scripts ; des millions de dollars ont été dépensés avant même que le film ne soit tourné ; de nombreux réalisateurs se sont succédés. Retour sur plusieurs années d'un douloureux accouchement...

Guerre froide

Dès 1987, les studios 20th Century Fox incitent Walter Hill et David Giler à développer un arc s'étalant sur deux films, qui seraient tournés l'un après l'autre (à l'instar des deux derniers volets de Retour vers le futur). Les dirigeants de Brandywine imaginent un conflit opposant le conglomérat Weyland-Yutani à une organisation séparatiste dont l'idéologie est proche du communisme. La Caporal Hicks aurait été le héros du premier film. Ripley serait revenue sur le devant de la scène, lors du second opus, pour lutter contre une armée d'aliens. Nous sommes en 1987, et une métaphore de la guerre froide semble être une idée parfaite. Mais Sigourney Weaver refuse, pendant quelques temps, de retrouver son rôle. La Fox avait en effet supprimé sa scène préférée d'Aliens, le retour. Une scène que James Cameron réintroduira dans sa version longue, où Ripley apprend que sa fille est décédée. L'actrice finira par changer d'avis, et approuve la disparition temporaire de son personnage durant le troisième film. « Ripley risquait de devenir un fardeau pour l'histoire », explique l'actrice. « Dans l'un des premiers scripts, le personnage principal, masculin, se sacrifiait, et Ripley se retrouvait obligé, encore, de partir à l'aventure ». Malgré l'économie du cachet de Sigourney Weaver, les dirigeants de la Fox s'avouent sceptiques. Ils acceptent cependant de donner le feu vert au projet, tout en insistant auprès des producteurs pour que Ridley Scott renoue avec l'univers qu'il a contribué à créer. Mais le cinéaste à d'autres projets. En septembre 1987, Walter Hill et David Giler proposent à l'écrivain américain William Gibson (Neuromancien) d'écrire le scénario d'Alien 3 à partir d'un synopsis de quinze pages qu'ils ont eux-même élaboré. L'auteur - un des principaux fondateurs du mouvement cyberpunk – accepte. « J'ai estimé que je devais peu m'écarter du synopsis fourni par les producteurs », se souvient William Gibson. « Ils m'avaient suggéré l'idée d'un empire spatial marxiste. La guerre froide était transposée dans l'espace ; la manipulation génétiques des aliens remplaçait le menace de la guerre nucléaire. Malgré son archaïsme quasi-instantané, j'ai trouvé le concept amusant. Je ne me souvenais pas avoir déjà vu un space opéra où les méchants étaient communistes... » Les manipulations génétiques évoquées dans ce script introduisent une contamination par voie aérienne : les « malades » se transforment, en quelque sorte, en « guerriers aliens » ! L'intrigue débute peu après les événements d'Aliens, le retour. Le vaisseau spatial Sulaco dérive dans une région de la galaxie appartenant à « l'Union du Peuple Progressiste » (UPP). Un facehugger, dissimulé dans les entrailles de Bishop, attaque les éclaireurs de l'organisation. Après s'en être débarrassé, ces derniers emportent l’androïde et abandonnent le navire. Récupéré par Weyland-Yutani, le Sulaco s'amarre à une station spatiale baptisée Anchorpoint. Newt est renvoyée saine et sauve sur Terre. Alors qu'un incendie plonge Ripley dans le coma, Hicks enquête sur des rumeurs indiquant que Weyland-Yutani développe des guerriers aliens. Ce qui s'avère bien entendu être le cas ! Les scientifiques de l'UPP jouent également aux apprentis sorciers avec le matériel génétique des xénomorphes. Les deux organisations ennemies perdent bientôt le contrôle de leurs créations, et Hicks doit collaborer avec les survivants pour détruire les aliens. Le Caporal et Bishop finissent pas se retrouver, l’androïde déclarant que les humains feraient mieux de s'unir contre leur ennemi commun. L'épilogue suggère que les protagonistes s'attaqueront à la source du fléau dans l'opus suivant. Les scènes d'actions de ce film auraient été encore plus nombreuses et frénétiques que dans celui de James Cameron ! Mais ce premier script est finalement écarté. Les producteurs insistent d'abord auprès de William Gibson afin qu'il procède à des réécritures, mais une grève des scénaristes paralyse alors Hollywood. Le romancier refuse de poursuivre la collaboration, tout en regrettant « les atermoiements des producteurs ». Un seul élément de ce premier scénario survivra jusqu'au film de David Fincher : les code-barres tatoués sur le crâne des personnages.

Fausse route

Fin 1988, Brandywine recrute enfin un réalisateur. Le finlandais Renny Harlin (Peur bleue), qui vient alors de terminer Le cauchemar de Freddy, annonce d'emblée qu'il est hors de question de copier ce qu'ont fait Ridley Scott et James Cameron. « Mon approche originelle consistait à placer l'intrigue sur la planète natale des aliens. Je voulais montrer leur véritable nature. Quelle intelligence se cache derrière leur évolution ? Peut-être ne sont-ils pas nés pour être méchants, après tout... » La Fox refuse immédiatement ce concept, qui risquerait d’entraîner des frais trop importants. Renny Harlin suggère alors d'engager le scénariste Eric Red (Hitcher). Son script reprend l'idée des expériences génétiques tout en évinçant, à nouveau, Ripley. Le Sulaco y est abordé par des soldats, qui découvrent que tous les occupants ont été tués par des aliens ! L'unique référence à Ripley est son nom, inscrit sur une combinaison... L'intrigue se déroule ensuite sur une petite station spatiale, où un militaire nommé Sam Smith fait office de protagoniste principal. Eric Red réintroduit le concept du virus alien, ainsi que celui des humains qui se transforment en cocons – à l'instar du Director's cut d'Alien, le huitième passager. L'aspect le plus étonnant de ce script ? Des expériences génétiques, organisées par l'armée, permettent de mêler l'ADN des xénomorphes avec ceux de plusieurs animaux : des poulets, des moustiques, des chats, des cochons, des bovins ou encore des chiens ! Avouons qu'il est délicat d'imaginer le résultat à l'écran... Gardons le meilleur pour la fin : ces étranges créatures ont la capacité d'infecter la matière organique, mais aussi la technologie et les objets inanimés. L'idée est que les aliens sont aussi des prédateurs au niveau moléculaire. Leurs cellules sont capables d'attaquer et assimiler tout ce qu'elles croisent, puis d'en reproduire les caractéristiques et la forme (prouvant indirectement que les xénomorphes sont bien les cousins extraterrestres de The Thing). L'armée projette donc de construire des « tanks aliens » ! Au cours du dernier acte, la station spatiale elle-même se transforme en une sorte de gigantesque créature hybride et biomécanique... La ligne rouge est indéniablement franchie. Dévasté, Renny Harlin tire sa révérence pour s'attaquer à 58 minutes pour vivre. Alors qu'Eric Red est évincé, David Giler et Walter Hill font définitivement une croix sur l'idée de produire deux volets. « Le problème, c est qu'ils ne voulaient pas que Sigourney Weaver soit de retour », justifie le scénariste. « J'ai donc dû créer toute une série de nouveaux personnages ». En octobre 1989, le scénariste David Twohy, futur réalisateur de The Arrival, Pitch Black et des Chroniques de Riddick, est appelé à la rescousse.

La grande évasion

Le script de David Twohy se déroule en orbite autour de la Terre, sur une colonie pénitentiaire... où sont organisées des expériences génétiques illégales ! Malgré les précédentes déconvenues, les dirigeants de Brandywine ne semblent pas vouloir abandonner ce concept. Cette fois-ci, point de Sulaco à l'horizon : l'histoire débute lorsque la « Compagnie » découvre le fossile d'un Facehugger conservé intact dans de l'ambre. Suite à leur « exécution » officielle, des condamnés à la peine de mort se réveillent face à un alien ; ces « volontaires » servent de cobayes à une opération militaire ! Le héros, Scott Taylor Styles, est emprisonné pour fraude et tentatives d'évasions. Il découvre bientôt l'existence des expériences secrètes et de clones d'alien, puis organise son évasion en compagnie de co-détenus... qui ne feront pas long feu ! Ripley n'est mentionnée que dans un document classifié sur lequel Scott met la main. Un incident finit par libérer un nouveau type d'alien, le « nouveau-né », et l'enfer recommence... Dans le denier acte, la station se vide de son oxygène et la créature poursuit les survivants – qui rejoignent un vaisseau d'évacuation grâce à des combinaisons hermétiques - dans le vide de l'espace. Le vaisseau à bord duquel Scott s'échappe la découpera en deux. Si le scénario est plutôt réussi, Joe Roth, le nouveau président du département cinéma de la Fox, refuse que Ripley ne soit pas présente dans Alien 3. « Sigourney est la pièce maîtresse de la série », déclare-t-il alors. De toutes manières, un nouveau réalisateur, le néo-zélandais Vincent Ward (Le navigateur: une odyssée médiévale, Au-delà de nos rêves), est parallèlement engagé. « Le navigateur m'avait émerveillé », avoue Walter Hill. Or Vincent Ward préfère développer son propre scénario plutôt que de filmer celui de David Twohy. De ce script, Alien 3 conservera l'idée de la prison. Et de nombreux autres éléments (les clones des aliens, les cobayes involontaires, des morts par aspiration dans l'espace) seront recyclés dans Alien Résurrection. Sans oublier que Scott Taylor Styles pourrait être considéré comme l'ancêtre d'un certain Riddick. Pour l'anecdote, David Twohy apprendra que Vincent Ward écrit un scénario pour Alien 3 alors qu'il travaillait encore sur sa version... pour rien !

L'heure du sacrifice

Il ne fait aucun doute que Vincent Ward a créé le plus original des (nombreux) scripts développés pour Alien 3. A l'instar de Renny Harlin avant lui, le cinéaste ne souhaite pas recopier les deux précédents films. Ripley atterrit sur Arceon, une station spatiale « médiévale » - partiellement construite en bois - abritant des moines. Hicks, Newt et Bishop, eux, n'ont pas survécus. Les moines, qui ont bien sûr fait vœu d'abstinence, considèrent l'arrivée de Ripley comme un test que leur impose leur dieu. Quand un alien débarquera à son tour, c'est le diable qui frappe à leur porte... « Et si un alien avait été découvert sur Terre dans un passé lointain ? », explique Vincent Ward. « Nos ancêtres l'auraient pris pour un suppôt de Satan. Imaginons que, dans le futur, une puissante secte ait rejeté toute technologie inventée après une certaine date. Le gouvernement en place s'en serait débarrassé en leur confiant un vieux satellite, où ils pourraient vivre à leur façon ». L'idée plaît à l'équipe de production. « Le concept imaginé par Vincent allait un peu trop loin », se souvient David Giler. « Mais c'est ce que nous voulions : repousser les limites ». Sigourney Weaver se montre elle-aussi très enthousiaste, louant l'originalité du projet. La Fox donne son feu vert. Vincent Ward insiste pour recruter un co-scénariste ; il propose les noms de David Webb Peoples (Blade Runner) ou Robert Bolt (Lawrence d'Arabie). Le studio engage John Fasano (Universal Soldier: Le combat absolu). « John écrit vite », explique Walter Hill, avant d'ajouter : « Et il fera ce qu'on lui dit ». Mais la collaboration entre les deux scénaristes ne se déroule pas comme prévu. Selon Vincent Ward, John Fasano crée des personnages bien trop stéréotypés. Il est donc remplacé par Greg Pruss (13). Le tandem décide que l'alien périra en plongeant dans une énorme cuve de verre en fusion, dont il s'évadera avant d'être aspergé d'eau glacée – ce qui le fera voler en éclats. Ripley, quant à elle, est fécondée par la créature. Mais Vincent Ward souhaite qu'une sorte de séance d'exorcisme, réalisée par un moine, oblige le Chestburster à quitter le corps de l’héroïne... pour mieux envahir celui de son sauveur, qui se sacrifie en se jetant dans un incendie ! Mais Sigourney Weaver insiste pour que son personnage meurt. « Adieu, fin de la série », explique-t-elle. « Je ne veux pas jouer dans les films suivants ». Alors que le scénario prend forme, le réalisateur s'envole pour Londres afin de superviser la construction des décors, au sein des studios Pinewood. Il recrute le légendaire directeur artistique Norman Reynolds, à qui l'on doit notamment les décors de L'Empire contre-attaque. Le courant passe immédiatement entre les deux hommes. « Vincent était très enthousiaste », précise Norman Reynolds. « Il avait énormément d'idées ». Au bout de trois mois, Rupert Murdoch, actionnaire principal du groupe News Corp (auquel appartient la Fox), décide qu'Alien 3 sortira pour Pâques 1990. Ce qui ne laisse qu'une poignée de mois !

Perdus dans l'espace

Or Walter Hill et David Giler ne sont pas satisfaits par la tournure que prend le scénario. « Cela n'avait plus aucun sens », explique Walter Hill, inquiet pour la viabilité commercial du projet. Les ambitions du réalisateur finissent pas calmer les ardeurs de la Fox et des membres de la production. L'idée de la station spatiale en bois est critiquée. Sept millions de dollars ont déjà été dépensés dans la pré-production de ce troisième volet ! Les dirigeants du studio refusent les nombreuses idées – qu'ils qualifient « excentriques » - de Vincent Ward, dont la construction d'une gigantesque cathédrale en bois. « En l'espace de quelques mois, les producteurs sont devenus plus conservateurs », se souvient Vincent Ward, qui subit de plus en plus de pressions de la part du studio. Lors d'un rendez-vous, des représentants de la Fox lui annoncent que l'idée de la station en bois doit être abandonnée. « Le film n'était plus qu'un simple remake », précise le cinéaste. Peu après, il quitte le projet. L'introduction et l'épilogue de son script, ainsi que le culte religieux des moines, seront cependant repris dans le film. « J'avoue que j'ai été surpris de découvrir mon nom au générique », s'amuse-t-il. Avec l'aide de Larry Ferguson (Highlander), Walter Hill et David Giler décident finalement d'écrire eux-même un scénario – en recyclant des éléments des précédents traitements – et d'engager David Fincher. Le jeune réalisateur, qui s'est fait un nom dans l'industrie de la publicité et des vidéoclips, invite Rex Pickett (Sideways) à améliorer le script – mais les producteurs n'adhèrent pas à sa vision. Les dirigeants de Brandywine enchaînent les réécritures - une douzaine au totale ! En janvier 1991, le réalisateur, tout juste âgé de 28 ans, entame le tournage dans les pires conditions possibles. Il n'a été recruté que pour filmer ce que désirent les financiers, ce qui lui laisse une faible marge de manœuvre. « Je voulais vraiment m'occuper d'Alien 3 », précise David Fincher. « J'en rêvais depuis mes seize ans. Je comprenais toutes les facettes de la saga, je savais ce que je pourrais en faire. On ne me l'a pas permis. Avec le recul, je comprend que c'est ma faute ». Inexpérimenté, le réalisateur subit plus qu'il ne crée. « Ce fut l'enfer pour lui », raconte l'acteur Brian Glover. « Il a fait au mieux ». Pendant le tournage, Sigourney Weaver tente de l'aider à décompresser. Mais le pire est à venir : le montage, ne convenant pas à la Fox, est remanié. Alien 3 sort aux Etats-Unis le 22 mai 1992. Les critiques sont généralement mauvaises, et le film ne récolte que 55 millions de dollars aux Etats-Unis. Son -petit- succès à l'international (105 millions) permettra cependant de ne pas le considérer comme un échec. Depuis lors, David Fincher évite d'aborder le sujet. L'édition Blu-ray d'Alien 3 permet cependant de découvrir un montage alternatif – auquel le réalisateur a refusé de participer – permettant d'avoir un aperçu de ce qu'aurait pu devenir le film. Ou plutôt, cette version-là du film ! En 1992, Sigourney Weaver, dont le personnage vient de se sacrifier, s'avoue ravie d'en avoir terminé avec la saga. « S'ils font une suite, ils devront faire sans moi ». Mais les héros ne meurent jamais...

[En discuter sur le forum]
Bookmark and Share


.